Aller au contenu

IMITEZ LEUR FOI | MIRIAM

« Chantez pour Jéhovah ! »

« Chantez pour Jéhovah ! »

 Postée à un endroit où on ne peut pas la voir, la fillette surveille de loin un point précis au milieu des roseaux. Alors que le Nil, le grand fleuve au bord duquel elle se trouve, coule tranquillement, elle se tient là, immobile, le moindre de ses petits muscles contracté. Bien que l’attente lui semble interminable, elle continue à guetter tout en s’efforçant d’ignorer les insectes qui, mollement, bourdonnent autour d’elle. Ce qu’elle ne quitte pas des yeux, c’est une corbeille rendue étanche dans laquelle se trouve... un bébé ! Ce bébé, c’est son petit frère. L’imaginer là, tout seul et sans défense, lui fend le cœur. Mais elle sait que ses parents ont raison : comme il est en train de se passer quelque chose d’effroyable, cette solution est la seule chance de survie pour son petit frère.

 Cette fillette fait preuve d’un courage remarquable, et elle est sur le point de se montrer plus courageuse encore. Dans son cœur est en train de se développer une qualité magnifique : la foi. Cette qualité va s’exprimer très clairement dans les instants qui vont suivre, mais elle va aussi influencer tout le cours de son existence. Des années plus tard, alors qu’elle sera avancée en âge, sa foi va la guider durant la période la plus palpitante de l’histoire de son peuple. Cette même qualité va lui être d’un grand secours le jour où elle va commettre une grave erreur. Mais qui est cette enfant ? Et que pouvons-​nous apprendre de son exemple de foi ?

Une enfant de l’esclavage

 Le récit biblique n’indique pas le nom de la fillette, mais peu de doutes planent sur son identité. Il s’agit de Miriam, la fille aînée d’Amram et de Jokébed, un couple d’Hébreux alors esclaves en Égypte. Son petit frère, le bébé dans la corbeille, va par la suite être appelé Moïse. Mais elle a un autre petit frère, âgé d’environ 3 ans, qui s’appelle Aaron. Quant à elle, bien que la Bible ne donne pas son âge, on peut logiquement penser qu’elle a moins de 10 ans.

 Le peuple auquel appartient Miriam traverse une période très sombre. Considérant les Hébreux comme une grande menace, les Égyptiens les ont réduits en esclavage et ils les oppriment. Pourtant, les esclaves continuent de se multiplier. Alors, pour mettre un frein à cette croissance qui leur fait peur, les Égyptiens emploient un moyen encore plus cruel. Pharaon a ordonné que chaque garçon hébreu qui vient au monde soit tué. Miriam a sûrement entendu parler de la foi de Shifra et de Poua, deux sages-femmes qui en secret ont désobéi à cet ordre (Exode 1:8-22).

 Elle a également été témoin de la foi de ses propres parents, Amram et Jokébed, qui ont caché leur troisième enfant, un magnifique petit garçon, durant les trois mois qui ont suivi sa naissance. Ils n’ont pas été terrifiés par l’ordre du roi au point de permettre que leur fils soit tué (Hébreux 11:23). Mais cacher un bébé, ce n’est pas facile et, très vite, ils se sont trouvés devant un choix extrêmement douloureux. Jokébed s’est vue contrainte d’aller déposer l’enfant à un endroit où quelqu’un pourra le trouver, quelqu’un qui pourra le protéger et prendre soin de lui. Elle a donc tissé une corbeille en papyrus, puis, pour la rendre étanche, l’a recouverte de bitume et de poix, après quoi elle est allée déposer son enfant bien-aimé sur les eaux du Nil. Imaginez, tout au long de cette opération, les prières ferventes qu’elle a dû adresser à Jéhovah ! Et c’est probablement elle qui a dit à Miriam de rester sur les lieux pour voir ce qui allait se passer (Exode 2:1-4).

Elle vole au secours de son frère

 Miriam reste donc là, et elle attend. Au bout d’un certain temps, elle voit du monde s’approcher. C’est un groupe d’Égyptiennes, et pas n’importe lesquelles. Il s’agit de la fille de Pharaon, accompagnée de ses servantes, qui vient se baigner dans le Nil. Sans doute qu’à leur vue, Miriam a le sang qui se glace. Peut-​elle seulement oser espérer que la propre fille de Pharaon viole l’ordre royal, qu’elle décide de protéger ce bébé hébreu ? Nul doute que la fillette prie intensément.

 La première à voir la corbeille au milieu des roseaux, c’est la fille de Pharaon. Elle envoie donc son esclave la chercher. Le récit dit ensuite au sujet de la princesse : « Quand elle l’ouvrit, elle vit le petit garçon ; il pleurait. » La princesse devine immédiatement ce qui est en train de se passer : une maman hébreue tente de sauver la vie de son enfant ! Mais, en voyant ce si beau bébé, elle est prise de pitié (Exode 2:5, 6). Extrêmement attentive, Miriam lit sûrement ce sentiment sur son visage. Elle comprend que ça y est, c’est le moment de montrer sa foi en Jéhovah. Rassemblant son courage, elle se dirige vers le groupe de femmes.

 On ignore à quel genre de châtiment une jeune esclave hébreue s’exposait pour avoir eu l’audace d’adresser la parole à un membre de la cour royale. Pourtant, sans détour, Miriam demande à la princesse : « Veux-​tu que j’aille appeler une nourrice chez les Hébreux pour qu’elle allaite l’enfant pour toi ? » C’est exactement la question qu’il fallait poser ! La fille de Pharaon n’est pas en mesure d’allaiter un bébé, elle le sait bien. Elle estime peut-être plus prudent que ce soit une Hébreue qui se charge de l’allaiter ; elle pourra le faire revenir chez elle plus tard, comme fils adoptif, puis s’occuper de son éducation et de son instruction. Alors elle fait à la fillette cette réponse très courte : « Vas-​y ! » À ces mots, le cœur de Miriam a dû bondir de joie (Exode 2:7, 8).

Avec courage, Miriam veille de loin sur son petit frère.

 Elle retourne à toute allure chez elle, où elle retrouve ses parents rongés par l’inquiétude. Imaginez-​la annoncer la nouvelle à sa mère essoufflée et tout excitée. Convaincue que c’est Jéhovah qui a dirigé les évènements, Jokébed, accompagnée de Miriam, va voir la fille de Pharaon. Elle s’efforce sans doute de cacher sa joie et son soulagement quand la princesse lui ordonne : « Emmène cet enfant, allaite-​le pour moi et moi je te paierai » (Exode 2:9).

 Ce jour-​là, Miriam en a beaucoup appris sur son Dieu, Jéhovah. Elle a appris qu’il se soucie de ses adorateurs et qu’il écoute leurs prières. Et elle a appris que le courage et la foi ne sont pas des qualités propres aux adultes ni même strictement masculines. Jéhovah écoute les prières de tous ses serviteurs fidèles (Psaume 65:2). En ces temps difficiles que nous vivons aujourd’hui, nous devons tous — jeunes ou âgés, hommes ou femmes — nous souvenir de cette vérité.

Une grande sœur patiente

 Jokébed va donc allaiter le petit enfant et en prendre soin. Et on peut imaginer à quel point Miriam s’attache à ce petit frère qu’elle a secouru. Peut-être qu’elle lui apprend à prononcer certains mots et que le jour où pour la première fois il dit « Jéhovah », le nom de son Dieu, elle frissonne de joie. Puis le garçon arrive à l’âge où il faut l’amener à la fille de Pharaon (Exode 2:10). C’est certainement une séparation très douloureuse pour toute la famille. Miriam a sûrement hâte de voir le genre d’homme que va devenir son frère, à qui la fille de Pharaon donne le nom Moïse. Bien qu’élevé à la cour royale égyptienne, va-​t-​il continuer d’aimer Jéhovah ?

 Au bout de quelques années, la réponse lui apparaît clairement. Ce qu’elle découvre la remplit de fierté : son petit frère est à présent un homme décidé à servir Jéhovah, plutôt qu’à profiter de tout ce que la cour royale de Pharaon peut lui offrir. À 40 ans, Moïse prend position pour son peuple en tuant un Égyptien qui a maltraité un esclave hébreu. Cet acte le mettant en danger de mort, il s’enfuit d’Égypte (Exode 2:11-15 ; Actes 7:23-29 ; Hébreux 11:24-26).

 Durant la quarantaine d’années qui suit, Moïse vit comme gardien de moutons dans le lointain pays de Madian, dans l’anonymat le plus complet. Pendant tout ce temps-​là, Miriam n’a peut-être pas de nouvelles de lui (Exode 3:1 ; Actes 7:29, 30). Les années passent et, alors qu’elle prend de l’âge, Miriam voit la souffrance de son peuple s’intensifier.

Une prophétesse de Jéhovah

 Alors que Miriam a probablement bien plus de 80 ans, Moïse revient, envoyé par Dieu, pour délivrer son peuple. Aaron lui sert de porte-parole. Ensemble, les deux frères de Miriam vont demander à Pharaon de laisser partir le peuple de Dieu. Mais Pharaon rejetant leur demande, ils retournent le voir à plusieurs reprises, tandis qu’en guise d’avertissement, Jéhovah envoie dix plaies sur l’Égypte. Nul doute que tout au long de cette période, Miriam fait tout pour soutenir et encourager ses frères dans leur mission. Enfin, avec la dernière plaie, la mise à mort de tous les fils premiers-nés des Égyptiens, l’heure du grand Exode d’Israël a sonné ! Représentez-​vous Miriam, infatigable, venant en aide aux uns et aux autres, alors que son peuple quitte l’Égypte sous la direction de Moïse (Exode 4:14-16, 27-31 ; 7:1–12:51).

 Un peu plus tard, Israël se trouve pris au piège entre la mer Rouge et l’armée égyptienne. Miriam voit son frère se poster devant la mer, puis tendre son bâton. Et là, un passage s’ouvre dans la mer ! Sur le lit asséché de la mer, Moïse fait traverser le peuple. Sûrement qu’à ce moment-​là, Miriam sent en elle sa foi vibrer comme jamais. Elle sert un Dieu qui est capable de tout faire, de réaliser n’importe quelle promesse ! (Exode 14:1-31).

 Le peuple se trouve enfin sain et sauf sur le rivage d’en face et, dans un grand fracas, la mer se referme sur Pharaon et son armée. Miriam se rend alors compte que Jéhovah est bien plus fort que la plus puissante des armées du monde. Soulagés, les Israélites ont envie de chanter des louanges à Jéhovah. Alors, Miriam entraîne les autres femmes à chanter avec elle : « Chantez pour Jéhovah, car il s’est couvert de gloire. Le cheval et son cavalier, il les a jetés dans la mer » (Exode 15:20, 21 ; Psaume 136:15).

Sur le rivage de la mer Rouge, Miriam, inspirée par Dieu, entraîne les autres femmes d’Israël à chanter avec elle un chant de victoire.

 C’est un des temps les plus forts de la vie de Miriam, un moment qu’elle n’oubliera jamais. À ce point précis du récit, elle est qualifiée de prophétesse. C’est la première femme dans la Bible à être désignée par cette appellation. Peu de femmes ont servi Jéhovah de cette façon particulière (Juges 4:4 ; 2 Rois 22:14 ; Isaïe 8:3 ; Luc 2:36).

 Ce fait nous rappelle que Jéhovah nous regarde et qu’il ne demande qu’à bénir nos humbles efforts, notre patience et notre désir de le louer. Jeunes et vieux, hommes et femmes, nous sommes tous capables de montrer notre foi en Jéhovah. Notre foi lui procure une grande joie, il ne l’oublie pas et il est heureux de la récompenser (Hébreux 6:10 ; 11:6). Voilà une excellente raison d’imiter la foi de Miriam !

Elle cède à l’orgueil

 Recevoir des honneurs et être en vue procure des joies mais comporte aussi des dangers. À l’époque où Israël est libéré de l’esclavage, Miriam est probablement la femme la plus en vue de la nation. Va-​t-​elle succomber à l’orgueil ou à l’ambition ? (Proverbes 16:18). Malheureusement oui, du moins pendant un temps.

 Quelques mois après l’Exode, Moïse accueille un groupe de personnes qui vient de loin : il s’agit de son beau-père, Jéthro, qui lui ramène sa femme, Séphora, et leurs deux fils. C’est au cours de son séjour de 40 ans en Madian que Moïse s’est marié avec Séphora. Séphora était retournée en Madian peut-être pour rendre visite à sa famille et, à présent, son père l’amenait au campement israélite (Exode 18:1-5). Imaginez comme leur arrivée doit faire sensation parmi le peuple de Moïse ! Beaucoup sont probablement curieux de voir la femme de celui que Dieu a choisi pour les conduire hors d’Égypte.

 Et Miriam, est-​elle contente, elle aussi ? Au début, peut-être. Mais apparemment, elle finit par céder à l’orgueil. Se sent-​elle menacée à l’idée que Séphora va peut-être lui voler sa place de femme la plus en vue ? Quoi qu’il en soit, Miriam et Aaron commencent à tenir des propos négatifs. Et comme cela arrive souvent, ces propos négatifs deviennent rapidement malveillants. Dans un premier temps, leur cible, c’est Séphora, à qui ils reprochent de ne pas être Israélite. En effet, c’est une Koushite a. Mais leur propos dégénèrent. Ils en viennent à se plaindre de Moïse lui-​même : « Jéhovah a-​t-​il parlé uniquement par Moïse ? N’a-​t-​il pas aussi parlé par notre intermédiaire ? » (Nombres 12:1, 2).

Lépreuse !

 Les paroles de Miriam et d’Aaron révèlent qu’un poison virulent est en train de leur attaquer le cœur. Mécontents de la manière dont Jéhovah se sert de Moïse, ils veulent avoir plus d’autorité et être plus influents. Est-​ce parce que Moïse est autoritaire, un homme orgueilleux qui court après la gloire ? Il a certainement des défauts, mais l’ambition et l’orgueil n’en font pas partie. Le récit inspiré déclare : « Moïse était de beaucoup le plus humble de tous les hommes vivant sur terre. » Toujours est-​il que Miriam et Aaron ont tort et qu’ils sont en danger. La Bible dit en effet que « Jéhovah écoutait » (Nombres 12:2, 3).

 Soudain, Jéhovah convoque les trois frères et sœur à la tente de la rencontre. Là, l’impressionnante colonne de nuage, qui symbolise la présence de Jéhovah, descend et se tient à l’entrée. Puis, Jéhovah prend la parole. Il réprimande Miriam et Aaron. Il leur rappelle la relation hors du commun qu’il entretient avec Moïse et la grande confiance qu’il a décidé de placer en lui. « Pourquoi donc n’avez-​vous pas craint de parler contre mon serviteur, contre Moïse ? », leur demande-​t-​il. Sûrement que Miriam et Aaron tremblent de peur. Jéhovah considère leur manque de respect envers Moïse comme un manque de respect envers lui-​même (Nombres 12:4-8).

 Manifestement, c’est Miriam qui est l’instigatrice de cette rébellion et qui a entraîné son frère cadet à s’attaquer avec elle à leur belle-sœur. Cela expliquerait pourquoi c’est elle qui va être punie. En effet, Jéhovah la frappe de la lèpre. Cette maladie terrifiante lui rend la peau « blanche comme la neige ». Immédiatement, Aaron s’humilie devant Moïse et le supplie d’intercéder pour eux. Il lui dit : « Nous avons agi stupidement. » Fidèle à sa réputation d’homme humble, Moïse crie alors vers Jéhovah : « Ô Dieu, s’il te plaît, guéris-​la ! S’il te plaît ! » (Nombres 12:9-13). La détresse des deux frères révèle que, malgré ses défauts, ils aiment profondément leur sœur aînée.

Elle retrouve la faveur de Jéhovah

 Jéhovah fait preuve de miséricorde. Miriam étant repentante, il accepte de la guérir. Toutefois, il exige qu’elle soit mise en quarantaine hors du camp d’Israël pendant sept jours. Ce doit être très humiliant pour elle d’obéir à cet ordre, puisqu’elle quitte le camp en raison de la défaveur de Jéhovah. Mais sa foi la sauve. Au fond d’elle, elle est convaincue que son Père, Jéhovah, est juste et qu’il la corrige par amour. Elle fait donc ce qui lui est demandé et, pendant les sept jours de son isolement, le camp doit patienter. Puis elle montre de nouveau sa foi en se soumettant humblement au protocole de sa réadmission dans le camp (Nombres 12:14, 15).

 Jéhovah corrige ceux qu’il aime (Hébreux 12:5, 6). Il aimait beaucoup trop Miriam pour fermer les yeux sur son orgueil. Cette correction lui a causé de la douleur, mais elle l’a également sauvée. Ayant accepté la correction avec un cœur sincère, elle a retrouvé l’approbation de Jéhovah. Miriam a vécu quasiment jusqu’à la fin du séjour d’Israël dans le désert. Elle a fini ses jours à Kadèsh, dans le désert de Zîn, probablement âgée de près de 130 ans b (Nombres 20:1). Des siècles plus tard, avec amour, Jéhovah a rendu hommage au service fidèle de Miriam. Par l’intermédiaire de son prophète Michée, il a rappelé à son peuple : « Je t’ai racheté du pays où tu étais esclave ; j’ai envoyé devant toi Moïse, Aaron et Miriam » (Michée 6:4).

Quand Jéhovah l’a corrigée, grâce à la foi, Miriam est restée humble.

 Il y a beaucoup de leçons à tirer de la vie de Miriam. Comme elle l’a fait quand elle était petite, il nous faut protéger les personnes sans défense et oser prendre la parole pour défendre le bien (Jacques 1:27). Comme elle, il nous faut faire connaître les déclarations de Dieu avec joie (Romains 10:15). Comme elle, il nous faut apprendre à rejeter le poison de la jalousie et de l’amertume (Proverbes 14:30). Et comme elle, il nous faut accepter la correction de Jéhovah avec humilité (Hébreux 12:5). Ce faisant, nous imiterons vraiment la foi de Miriam.

a Dans le cas de Séphora, le mot « Koushite » signifie de toute évidence que, comme les autres Madianites, elle était originaire d’Arabie, et non d’Éthiopie.

b Les trois frères et sœur sont morts dans l’ordre de leur naissance : d’abord Miriam, puis Aaron et ensuite Moïse, et ce, apparemment en l’espace d’une année.